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Loi 27 : êtes-vous prêts pour le 6 octobre?

Julie Banville, CRHA
Loi 27 : êtes-vous prêts pour le 6 octobre?

Depuis l’entrée en vigueur de la Loi 27 modernisant le régime de santé et de sécurité du travail (LMRSST), les entreprises du Québec doivent élargir leur conception de la prévention. À compter du 6 octobre, la période transitoire prend fin : l’intégration des risques psychosociaux (RPS) devient une exigence légale claire. Stress chronique, surcharge, manque de reconnaissance ou climat malsain ne peuvent plus être ignorés. Ils représentent désormais non seulement des enjeux de conformité, mais aussi des leviers ou des freins à la performance, à l’attractivité et au bien-être au travail. 

Un virage rendu incontournable 

Invalidités en entreprise

La Loi sur la santé et la sécurité du travail date de 1979, une époque où la santé mentale au travail était tout simplement absente des préoccupations officielles. On n’en parlait pas, alors même que les impacts psychologiques du travail existaient déjà. Quarante-cinq ans plus tard, la réalité ne peut plus être ignorée : plus de la moitié des invalidités en entreprise sont aujourd’hui liées à des troubles psychologiques. Le législateur a donc choisi de mettre à jour le cadre juridique pour refléter cette transformation majeure. 

En pratique, cela signifie que la prévention doit désormais viser autant l’ergonomie d’un poste que la reconnaissance au travail, autant la sécurité d’un entrepôt que la charge de travail imposée aux équipes. 

Ce que la loi change pour les organisations 

Les obligations varient selon la taille de l’entreprise :

► Moins de 20 employé·es doivent désigner un·e agent·e de liaison et mettre en place un plan d’action simplifié.

► À partir de 20 employé·es, un comité santé-sécurité est requis, avec un programme structuré incluant les RPS. Des formations sont obligatoires pour les personnes traitant les plaintes et recommandées pour tous. La CNESST encourage aussi des audits internes réguliers pour assurer la conformité et l’adaptation continue des pratiques. 

Identifier et comprendre les risques : une responsabilité partagée

La Loi 27 distingue deux types de risques : les situations nécessitant une action immédiate (harcèlement, violence, événements traumatiques) et les facteurs psychosociaux comme la charge de travail, le soutien ou la reconnaissance. Bien gérés, ces facteurs renforcent l'engagement et la santé mentale. La loi souligne aussi la responsabilité partagée : chaque employé·e doit veiller à sa propre santé psychologique (article 49) et les employeurs doivent inclure la violence conjugale et familiale dans leurs mesures de prévention (article 51). Promouvoir un environnement de travail sain devient ainsi un projet collectif. 

Une démarche structurée en trois étapes

Plutôt que de se perdre dans des listes d’actions ponctuelles, la prévention des risques psychosociaux gagne à s’inscrire dans une démarche claire, progressive et intégrée.

Nous la résumons en trois étapes clés :

1. Comprendre et diagnostiquer

RPS comprendre et diagnostiquer

Il s’agit de mobiliser les parties prenantes (direction, gestionnaires, employé·es, représentant·es syndicaux ou de santé et sécurité) afin de dresser un portrait complet de la situation. Cette étape inclut la collecte d’informations (questionnaires, entrevues, analyses de climat), l’identification des risques psychosociaux et leur priorisation selon leur gravité et leur probabilité.

2. Planifier et agir

RPS Planifier et agir

À partir du diagnostic, l’organisation conçoit un plan d’action adapté à son contexte. Celui-ci doit préciser les responsables, les échéanciers et prévoir des interventions sur trois niveaux :

Primaire : agir à la source (ex. réviser la charge de travail, clarifier les rôles);

Secondaire : renforcer les compétences et la résilience (formations, accompagnement, sensibilisation);

Tertiaire : soutenir les personnes déjà affectées afin de réduire l’impact et prévenir les rechutes.

3. Déployer et ajuster

RPS Déployer et ajuster

Les actions sont mises en œuvre, suivies et ajustées dans une logique d’amélioration continue. Des indicateurs permettent de mesurer l’efficacité des mesures et d’assurer que la prévention s’ancre durablement dans la culture organisationnelle.

Bonnes pratiques et erreurs fréquentes 

Quelques leviers renforcent l’efficacité de la démarche : 

  • Inscrire cette démarche comme une priorité de l’organisation, avec l’implication concrète de la haute direction 
  • Former les gestionnaires dès le départ pour qu’ils ou elles intègrent la prévention dans leur style de gestion. 
  • Impliquer les employé·es pour assurer la cohérence et l’adhésion. 
  • Reconnaître les efforts et maintenir une communication transparente. 

À l’inverse, certaines erreurs nuisent à la crédibilité des initiatives : 

  • Interrompre le processus après le diagnostic sans mettre en œuvre de plan d’action. 
  • Circonscrire la prévention au seul service RH ou à un comité restreint. 
  • Miser sur des interventions isolées (ex. une formation ponctuelle) sans revoir l’organisation du travail et les pratiques de gestion en place. 

Transformer l’obligation en levier stratégique 

Se conformer à la Loi 27 ne devrait pas être vu comme un simple exercice de conformité. Pour les organisations, il s’agit d’une occasion unique de : 

  • renforcer leur réputation et leur attractivité comme employeur; 
  • réduire l’absentéisme et les conflits; 
  • fidéliser les talents; 
  • stimuler la productivité en créant un climat de confiance et d’équité. 

La prévention des RPS devient alors bien plus qu’un mécanisme légal : c’est un outil de gouvernance et de performance durable. 

Pour conclure 

La Loi 27 change les règles du jeu : la santé organisationnelle ne se limite plus à l’évitement des blessures physiques, mais inclut désormais la santé psychologique et les facteurs humains. 

Depuis avril 2022, les nouvelles exigences en matière de prévention des risques psychosociaux s’appliquent sous la forme d’un programme intérimaire. Mais cette période transitoire touche à sa fin : à compter du 6 octobre 2024, toutes les organisations devront être pleinement conformes au nouveau cadre légal

En intégrant dès maintenant la prévention des risques psychosociaux dans leurs pratiques, les entreprises ne font pas que répondre à une obligation : elles se donnent un puissant levier stratégique.

Pour aller plus loin : 

➡️ Harcèlement au travail : prévenir et intervenir en tant que gestionnaire

➡️ Loi 27 et prévention des risques psychosociaux

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