Commençons par préciser les choses : qui est qui ?
Quelles sont les différentes générations et leurs caractéristiques
Boomers (1946-1964) : priorité à la carrière et au salaire. Les méthodes traditionnelles, en présence, ont leur faveur.
X (1965-1980) : priorité à l’indépendance et disposés aux heures supplémentaires. Facilement entrepreneurial.
Y, les milléniaux (1983-1996) : priorité à l’épanouissement, à l’équilibre travail/vie personnelle. Les premiers à avoir baigné dans la technologie et donc hyper connectés et privilégiant les plateformes collaboratives en ligne.
Z (1997- aujourd’hui) : aussi appelés Digital Natives, sortent à peine de l’école et sont persuadés que la technologie va aider la communication. Eux mettent l’accent sur leurs collègues plus que sur le reste.
Dans les grandes lignes nous pourrions dire que les Boomers et les X sont plus matérialistes et attachés à leur statut, là où les Y et les Z sont plus en quête de sens et, dans une certaine mesure, de bonheur.
Mettons tout de suite des limites à ce qui vient d’être énoncé : votre génération ne détermine pas inévitablement vos aspirations professionnelles. Et c’est souvent plus sur la forme que sur le fond que les différences émergent. À condition que quelques éléments clés soient clairs pour tous, nous y reviendrons.
Quels sont les enjeux possibles de cette mixité générationnelle
Si les descriptions relatives à chaque génération que nous avons données plus haut peuvent faire cliché, elles ont la vie dure et se retrouvent dans les perceptions des uns et des autres. « Les jeunes n’ont pas le sens du travail », « les vieux sont hostiles au changement », « les jeunes ne respectent rien », « les vieux sont complètement largués », etc. Pour une entreprise cela peut représenter un enjeu si les différences sont mal gérées :
Enjeu dans le transfert des connaissances.
Si votre expert part à la retraite et que la somme de ses savoir-faire n’est pas documentée, que ceux qui restent ne sont pas formés (ou en phase de l’être), c’est potentiellement une partie de votre activité qui part aussi à la retraite.
Enjeu dans la cohésion des équipes.
Si les collaborateurs se tirent dans les pattes et collaborent mal, cela n’augure rien de bon. Vous allez vous retrouver avec des livrables en retard ou qui ne respectent pas les requis, notamment parce que l’imputabilité sera devenue floue et que toutes les raisons seront bonnes pour pointer l’autre du doigt. C’est aussi une ambiance de travail dégradée… qui génère souvent un fort taux de roulement.
Enjeu organisationnel.
D’abord réussir à attirer les talents des jeunes générations, ensuite réussir à les retenir, anticiper qu’ils ne resteront sans doute pas, quoi qu’il arrive. S’attendre aussi à devoir répondre à un besoin de transparence, de valeurs et d’implication de certains.
Enjeu d’objectifs.
Entre des connaissances mal documentées et des collaborations qui se font mal, nul besoin d’avoir fait un MBA pour comprendre que l’atteinte des objectifs ne sera pas évidente…
Avec une pénurie de main d’œuvre dont on sait qu’elle va durer, les organisations, et surtout leurs gestionnaires, vont devoir faire contre mauvaise fortune bon cœur. Autrement dit, trouver des moyens pour faire que tout ce beau monde cohabite, collabore et contribue aux résultats.
Comment gérer les générations malgré leurs différences
Vous pouvez changer votre mode de gestion selon le profil (énoncé plus haut) à qui vous vous adressez. Il faut être un peu contorsionniste dans l’âme et ce n’est pas une posture aisée. Après tout, n’est pas caméléon qui veut. Le but est donc plus d’adapter (que de changer) son mode de gestion, et ainsi contribuer à ce que chaque génération s’adapte aux autres en retour.
En fait, comme pour n’importe quelle équipe, le but est de favoriser la collaboration. Et cela ne devrait pas être si difficile ni tant une question de génération. Comme les spécialistes l'affirment, toutes les générations ont eu tendance à blâmer la suivante (les jeunes sont faignants… mais ils sont nombreux à occuper une jobine en dehors de leurs heures de cours), alors que bien souvent, quand on creuse un peu, les aspirations sont similaires (concilier personnel et professionnel).
Et pour y arriver les moyens peuvent être variés. D’abord parce que les objectifs professionnels et personnels des uns et des autres sont différents et vraisemblablement indépendants de l’âge. Le chef d’équipe ne mettra donc pas de l’avant les mêmes bénéfices à tirer du nouveau projet à livrer, par exemple. Ensuite il lui faudra communiquer différemment selon la nature du message et la cible.
Plus largement, le gestionnaire dispose d’outils « naturels » pour se faire aider dans son rôle. À commencer par les valeurs de l’entreprise. Elles devraient naturellement entrer en résonnance avec celles des membres de l’équipe. Dans le cas contraire, le collaborateur ne restera pas, quelle que soit sa génération. Qui plus est, rappelons-le, les valeurs ne sont étonnement pas si disparates d’une génération à l’autre.
Une fois que tout le monde est en accord avec les valeurs et la vision de l’entreprise, d’autres actions sont possibles. Il devient dès lors plus facile de manager une équipe intergénérationnelle.
- En s’intéressant aux motivations individuelles, rôle qui relève déjà du gestionnaire.
En favorisant l’autonomisation : en impliquant ceux qui le demandent dans le processus décisionnel et en donnant des responsabilités à ceux qui s’en sentent capables. Et donc en acceptant de faire des essais en tant que gestionnaire, en ayant une certaine tolérance au risque (un risque mesuré car les suggestions précédentes doivent avoir lieu de façon progressive). Cela présente un double avantage : montrer l’exemple et favoriser une forme d’innovation. - En instaurant du mentorat et du mentorat inversé. D’abord parce que l’on a tous à apprendre les uns des autres, mais aussi pour limiter (voire gommer) la fracture générationnelle et solidifier l’équipe. En se côtoyant on se comprend, on se tolère et on s’accepte. Par la suite le niveau de tension est bien plus faible car les membres ont une meilleure lecture les uns des autres. D’ailleurs pour cimenter encore plus ce début de mobilisation, pourquoi ne pas organiser des moments en dehors du travail. Ce sont des belles occasions pour se découvrir des passions communes et relativiser les différences que l’on imaginait chez l’autre.
- En développant les habiletés comportementales (soft skills) des uns et des autres. Un plan de formation c’est utile pour attirer et retenir les talents, mais aussi pour leur permettre de se développer. Si la formation est commanditée par l’entreprise, elle se fera en cohérence avec les objectifs d’affaires. Tout le monde y gagne.
- En maintenant des équipes intergénérationnelles, donc hétérogènes. Parce que ce sont bien nos différences individuelles qui rendent le groupe plus fort, entre autres, grâce à l’intelligence collective. Et d’embarquer l’équipe dans un projet commun (avec des livrables différents bien sûr) et des objectifs clairs. Ce qui n’empêche pas de saluer les contributions individuelles.
Conclusion
Assurer la bonne gestion d’une équipe intergénérationnelle n’est pas évident, mais ce n’est pas non plus radicalement différent de la gestion d’une équipe standard, si tant est que cela existe. Il s’agit d’abord de cerner les différences et les motivations des uns et des autres pour y répondre en conséquence et susciter l’intérêt d’abord et l’adhésion ensuite. Cela demande, bien évidemment, de l’adaptation. Mais là aussi, rien de nouveau sous le soleil, pour les gestionnaires. D’autant que cette adaptation, sil elle est réussie, c’est la porte ouverte à une équipe soudée et efficace car consciente de ses forces, multiples.
Pour aller plus loin :
Intergénération : tirer profit des différencesà lire aussi :
Z : une génération tout en nuances
Voir toutes les formations en Gestion des talents
Photo by Benjamin Ranger on Unsplash