Connectée mais isolée
Oui, ils et elles sont né·es avec un cellulaire dans les mains, avec lequel ils et elles sont bien plus habiles que leurs aîné·es. Toutefois, cette situation se révèle autant une force qu’une faiblesse : leurs habiletés technologiques ont pris le pas sur le savoir-être social. Les Z vivent leur vie à travers un écran. La difficulté, même l’incapacité dans certains cas, à interagir en personne crée des problèmes, par exemple lors d’une intégration dans un nouveau poste. Les gestionnaires doivent faire preuve de créativité en offrant des occasions pour leurs employé·es de nouer des liens, de socialiser autrement que via un écran.
Enjeux de santé mentale
Savoir que 75 % des Z ont déjà eu un épisode d’anxiété et que la moitié souffre ou a souffert de dépression laisse songeur et ne peut certainement pas être passé sous silence. Plusieurs connaissent une précarité financière, considèrent l’accès à la propriété comme inatteignable, ne se sentent pas toujours soutenu·es au travail, souffrent d’une comparaison constante (gracieuseté des médias sociaux), d’un manque de connexion humaine, et vivent une profonde anxiété quant à la crise climatique et autres enjeux globaux. Ils et elles doutent, sont insécures et pessimistes.
Sachant que les problèmes de santé mentale sont de plus en plus présents dans nos milieux professionnels (et pas seulement pour les Z d’ailleurs), le climat de travail devient un élément clé du bien-être professionnel. Et qui est responsable d’instaurer un climat sain, ou chaque personne devrait se sentir à l’aise de parler de son stress ou ses problèmes de santé mentale, sans risquer moqueries ou représailles ?
Chaque personne dans l’équipe, bien entendu !
Les gestionnaires ont toutefois un rôle de premier plan à jouer. C’est à eux que revient la responsabilité d’être le chien de garde du climat dans l’équipe, tout en prenant soin de leur propre santé mentale, évidemment. C’est une lourde responsabilité et les organisations doivent en tenir compte en leur donnant suffisamment d’autonomie pour qu’ils et elles puissent soutenir les membres de leurs équipes en fonction de leurs besoins spécifiques.
Valeur travail
On l’entend souvent : « les jeunes ne veulent pas travailler ». Rappelons que même Socrate s’en plaignait. Rien de nouveau sous le soleil, donc! Toutefois on ne peut passer sous silence certaines caractéristiques troublantes observées chez les Z, qui, selon des milliers de professionnel·les en ressources humaines interrogé·es, manquent de motivation, d’autonomie, de professionnalisme… n’en jetez plus ! Considérant que les Z sont la relève de nos organisations, la situation est inquiétante et se doit d’être réfléchie et réalignée rapidement.
Les Z détestent la hiérarchie et les ordres. Ils et elles travaillent avec quelqu’un et non pour quelqu’un. Cette génération demande confiance et transparence de la part du ou de la gestionnaire. Le salaire, la proximité du domicile et la flexibilité dans le travail sont des critères des plus importants dans le choix d’un emploi. Ils et elles recherchent un employeur engagé. En fait, la notion de sens est primordiale. Les Z ont grandi dans un environnement où la diversité et l‘ouverture d’esprit sont une simple réalité. Ils et elles ont besoin de contribuer à quelque chose qui respecte leurs valeurs, qui fait une différence.
À la lumière des enjeux de santé mentale que l’on vient d’aborder, on peut d’ores et déjà imaginer que les Z vont avoir besoin de soutien. Le mentorat devrait se démocratiser et devenir un outil offert à tous ceux et celles qui le désirent. Discuter d’enjeux de travail et de vie avec un·e mentor·e plus expérimenté·e s’avère une merveilleuse occasion de nouer des liens, de développer ses habiletés sociales. Il en est de même pour le coaching ou encore le groupe de codéveloppement professionnel. Toutes ces occasions d’apprentissage favorisent non seulement le développement professionnel, mais visent aussi à grandir en tant qu’être humain. Dans un autre ordre d’idées, de nombreuses organisations se sont dotées d’un programme d’intégration des nouvelles recrues essentiellement orienté sur ce qu’elles doivent faire pour faciliter leur intégration « humaine » dans l’équipe. On sort des sentiers battus où l’intégration se limitait à l’apprentissage des tâches.
Enfin, il faut accepter que nous n’avons pas tous la même relation au travail, que la réussite professionnelle n’est pas forcément une fin en soi, que devenir gestionnaire n’est pas une condition sine qua non de parcours réussi. Peut-on légitimement en vouloir aux Z de trainer des pieds quand le spectacle que leur offrent leurs collègues des générations précédentes se compose de surmenage, d’horaires à rallonge, de conflits, et où la compétence n’est pas toujours reconnue ?
Et si le stade de vie était plus important que l’âge
Le modèle issu de la recherche sociologique considère que le stade de vie a un impact non négligeable dans les besoins des employé·es. En fait, tous les travailleurs et toutes les travailleuses se soucient des mêmes choses, c’est la priorité des besoins qui tend à changer.
En début carrière, sans enfants, sans trop d’engagements financiers, un individu peut se concentrer sur son développement professionnel, la constitution d’un capital social et la recherche de la prochaine opportunité intéressante.
Toutefois, les années passant, la famille, des enfants, des parents âgés dont on doit prendre soin, risquent grandement d’orienter les priorités sur l’accomplissement d’un travail de qualité avec un maximum d’efficacité et d’efficience, de manière qu’il puisse s’intégrer dans toutes les autres exigences de la vie.
Plus âgé·es, la priorité peut devenir de partager ses connaissances, de servir de mentor·e, de contribuer à la mémoire organisationnelle ou de laisser un héritage.
Ainsi, les organisations ont intérêt à prendre en compte ce qui est le plus important dans le travail pour toutes les générations, et à traiter les gens individuellement, selon les besoins reliés au stade de leur vie, donc en les écoutant, en faisant preuve d’empathie et en leur offrant le plus de choix possibles.
Conclusion
À la lumière des valeurs du travail que démontrent les Z, on peut se demander quel genre de gestionnaire en émanera. On a pu souvent noter que les enfants élevés par des parents « sévères » deviennent des parents laxistes. L’inverse est aussi vrai, les enfants élevés par des parents laxistes deviennent des parents sévères.
Qu’adviendra-t-il de ces représentant·es de la génération Z, qui détestent la hiérarchie, qui s’attendent à ce que leur gestionnaire fasse preuve de confiance et leur laisse une très grande autonomie, lorsqu’ils ou elles atteindront des postes de gestion ? Assisterons-nous à un retour du balancier ou reproduiront-ils et elles les comportements auxquels ils s’attendaient lorsqu’ils et elles avaient un statut d’employé·e ?
Pour aller plus loin :
Intergénération : tirer profit des différences
Photo de Kiana Bosman sur Unsplash