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Les gestionnaires : piliers de l’organisation… mais formés sur le tas?

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Les gestionnaires : piliers de l’organisation… mais formés sur le tas?

J’ai lu un article dernièrement qui rappelait le rôle crucial des gestionnaires au sein des organisations, pour des raisons opérationnelles, stratégiques et humaines. C’est vrai ! Mais alors si ce rôle est crucial, pourquoi ne bénéficie-t-il pas d’une attention soutenue, d’un accompagnement structuré, d’un investissement régulier, de formation continue ? La réalité terrain vient confirmer cette analyse en nous montrant des gestionnaires promu·e·s sans préparation, formé·e·s sur le tas, souvent livré·e·s à eux et elles-mêmes dans un environnement de plus en plus complexe. Il y a là un décalage flagrant entre le discours et les pratiques.

Le mythe du « gestionnaire naturel » : quand la promotion ne suffit pas

Trop souvent, devenir gestionnaire est vu comme une suite logique : un·e employé·e performant·e, reconnu·e pour ses compétences techniques, ou son ancienneté, est promu·e à un poste de supervision.
Le problème ? Ni l’expertise, ni l’ancienneté ne garantissent la capacité à mobiliser, influencer, fédérer, arbitrer, communiquer, faire grandir, rendre des comptes (liste non exhaustive)… Or, ces responsabilités ne sont pas innées, et ne s’acquièrent pas par osmose.

C’est d’autant plus regrettable qu’aujourd’hui, les gestionnaires sont confronté·es· à un environnement de travail profondément transformé : modèles hybrides, incertitude économique, rythmes accélérés, réorganisations successives, quête de sens grandissante, nouvelles attentes générationnelles… Le cadre de gestion traditionnel ne s’applique plus. Malgré ce fait, on continue trop souvent d’y perpétrer des façons de faire et d’être issues d’un autre temps.

Cette situation a des effets néfastes :

  • sur le moral des gestionnaires eux-mêmes, qui peuvent se sentir incompétent·es, dépassé·es ou seul·es,
  • sur leurs équipes, qui subissent leurs maladresses, leurs hésitations ou leur autoritarisme,
  • sur l’organisation, qui voit s’éroder la performance, la mobilisation, la rétention des talents.

Vous l’avez compris, un·e gestionnaire qui n’a pas appris son métier de gestionnaire peut coûter cher.

Développer les habiletés de gestion : un indispensable encore trop souvent ignoré

Les organisations investissent dans des logiciels sophistiqués, des équipements toujours plus performants, des restructurations prometteuses … sans offrir un véritable parcours de développement à celles et ceux qui sont censé·es guider les gens dans ces transformations.

Quand on sonde autour de soi, il n’est pas rare de constater que bien des gestionnaires n’ont eu de formation pour les aider dans leur rôle, que bien des années après leur entrée en poste !
Imagine-t-on confier un avion à une personne qui n’a pas été entrainée, en se disant qu’elle apprendra en vol? Bien sûr que non! Alors, comment peut-on confier le pilotage d’une équipe à une personne sans lui fournir aussi les outils de base du métier?  C’est pourtant ce que vivent beaucoup de gestionnaires au quotidien.

Pourquoi de plus en plus d’employé·es refusent les rôles de gestion

Fut un temps où il était presque impensable que les postes en gestion ne puissent pas être recherchés ou populaires, et pourtant… de plus en plus d’employé·es, particulièrement dans la génération Z, refusent aujourd’hui ces postes, notamment parce que le prix à payer est élevé : surcharge mentale, responsabilités floues, pression constante, sentiment d’isolement. Et, trop souvent, une absence de reconnaissance ou de soutien.

Ce désintérêt croissant pour les rôles de gestion n’est pas une crise de vocation : c’est un signal d’alarme. Il reflète une dévalorisation de la fonction, une précarisation du rôle, un manque de vision dans l’organisation du travail.

Quelles actions concrètes pour soutenir et développer les gestionnaires ?

Cesser de dire que le rôle est crucial et mettre en place des actions concrètes :

  • anticiper les prises de poste, en préparant les futur·es gestionnaires avant leur nomination,
  • offrir un véritable parcours de développement, pas seulement un atelier ponctuel,
  • miser sur le développement des savoir être, pas uniquement sur les outils et les procédures,
  • créer des espaces de soutien et de réflexion pour les gestionnaires : mentorat, codéveloppement, supervision, coaching,
  • ajuster les conditions de travail pour permettre une vraie qualité de présence, pas une gestion de l’urgence perpétuelle.

Et surtout, reconnaître que les gestionnaires méritent autre chose que de naviguer seul·es dans l’incertitude. Leur donner les moyens d'apprendre leur nouveau métier, d’évoluer et de prendre soin d’elles et d’eux est un acte stratégique, pas un luxe.

Le nouveau profil du et de la gestionnaire : agilité et intelligence relationnelle

Le ou la gestionnaire ne se définit plus seulement par sa capacité à planifier, contrôler ou décider. Avec des équipes (parfois) éclatées, une hiérarchie plus horizontale, des employé·es qui ne reconnaissent plus l’autorité, on attend du ou de la gestionnaire de :

  • créer un environnement de travail sain (confiance, sécurité physique et psychologique, cadre clair),
  • incarner une posture relationnelle saine : écoute, rétroaction, authenticité, transparence,
  • accompagner plutôt que de diriger : en révélant les talents et en favorisant l’autonomie de chacun,
  • prendre soin de son propre bien-être, pour mieux prendre soin de celui des autres,
  • savoir poser ses limites, demander de l’aide, reconnaître ses vulnérabilités.

Bref, une posture qui mêle savoir-faire opérationnel et savoir-être relationnel; un équilibre qui ne s’improvise pas, mais qui peut (et doit) s’apprendre, s’exercer, s’ajuster avec de bons repères.

Ce « nouveau » rôle est porteur de sens et de richesse, à condition que les organisations cessent de l’isoler et que les individus soient outillés pour y réussir sans s’épuiser.

Tirer les vraies leçons : revaloriser le rôle de gestionnaire avec courage et cohérence

On ne peut plus se contenter de dire que le rôle des gestionnaires est crucial. Il est temps d’en tirer les conséquences concrètes : sortir du mythe de la promotion par mérite technique, offrir des repères durables plutôt que des recettes express et soutenir un leadership plus humain, plus ancré, plus conscient. Cela implique des choix organisationnels, mais aussi des parcours d’acquisition et de développement à la hauteur des enjeux.

Bonne nouvelle : ce virage est possible, et il commence souvent par le courage de faire les choses autrement.

Pour aller plus loin :

➡️ Gestion d'équipe : acquérir les savoir-faire essentiels

 

Photo de Jacob Le sur Unsplash

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